Dimanche 28 juin 2009

Des échelles sans personne, des poignées de cerises qui tachent les mains des enfants, on passe, ils jouent à mourir. Un grand a bien fait les choses et s’est entamé profondément le pouce avec son opinel, d’autres crachent des noyaux.
A l’écart les abeilles vont et viennent en passant sous les avant-toits rouge, bleu et jaune des ruches placées sous un hêtre aux capsules poilues couleur de miel.
On attend, on n’arrête pas d’attendre, ceux qui peinent, ceux qui vont de l’avant, ceux qui nous attendent, ceux qui nous ignorent ou nous ont oubliés. Par l’ouverture on aperçoit la plaine vallonnée qui s’étend jusqu’au Jura, les traces plus jaunes du passage des chars dans les champs moissonnés, les ballots de paille deux par deux, les arabesques vert profond qui cachent les rivières, quelques pièces d’un puzzle qui s’étend jusqu’à l’horizon, et ici et là, d’immenses pylones et quelques clochers reliés par des fils invisibles.
Les casquettes à visière et les lunettes à soleil cachent la liberté qui les habite, des griottes sur leurs oreilles enflamment leur silhouette tandis que quelques papillons se posent sur les polos de couleur, d’autres papillons virevoltent et nous suivent un instant.
Il fait chaud, les champs de maïs aux feuilles d’acanthe ont besoin d’eau, mais les nuages qui s’amoncèlent au nord ne tiendront pas aujourd’hui leurs promesses, et la savante architecture de tuyaux d’acier inoxydable qui recouvre les cultures des maraîchers demeure muette. Peu d’eau dans la Mèbre, peu d’eau dans la Chamberonne, peu d’eau dans la Venoge. Toutes les trois laissent voir leurs gencives de molasse. Du côté de Jotenel, les tournesols ont le visage tourné vers nous.
On a traversé les villages comme on enfile des perles. On y entre on en sort, les tunnels ne sont pas là ou l’on croit. Trois fois dans la journée, on apercevra par une échancrure la surface bleue, immobile, du grand lac.

Jean Prod’hom