Dimanche 6 novembre 2011

Pour Christine Jeanney

Le vide s’associe au calcaire pour offrir parfois à celui qui n’en demandait pas tant des corps de pierre gorgés d’eau. Pas touche, ou avec les lèvres au creux de ton bras. Vase égaré qui ne sert plus, mis au ban de ce qui passe et chute, tenant enclos ce quelque chose qu’on aperçoit dans les yeux du captif, persistant lorsque la partie est perdue. On ne l’imaginait même pas. Rien en lui, pas plus hors de lui, l’impair solaire qui brille et manque de rien. S’il est amputé, ce n’est pas tant de ce qu’il retenait dans son ventre, mais des mains sur ses flancs. Le jour creuse les reins, on ferme les portes, sens-tu ton corps qui s’ourle et roule dans la nuit.


Vase funéraire, haut d’une trentaine de centimètres, égyptien, Ve ou VIe dynastie, sous-sol du MUDAC, cote Ber0457 de la collection Berger. Vide.

Le vase tient l’avenir entre ses mains comme les pivoines et, tandis que le vent dépose ses grains de braise sur le sable, il reste en arrière, intouchable, tenu par rien, vieilli dès le premier jour, sans jamais avoir à songer revenir en arrière. Il médite sous cloche, la durée finira le travail entrepris jadis, lento, lento, ça bouge à peine, mais la pierre fond, coule, fait tenir ensemble l’interminable disparition de ce qui était et sera avant et après nous.

Jean Prod’hom