Vallon de Van (Salvan)

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Cher Pierre,
En hiver, les voitures ne montent pas ni à Van d’en Haut ni à Van d’en Bas ; et puis l’auberge fait relâche aujourd’hui. Si bien que je ne rencontre personne sur la route fermée à la circulation, étroite et enneigée. Si, une vieille dame que je dépasse et qui avance au pas pour ménager son cœur, puis un couple et leur jeune enfant que je croise et qui ne se consolent pas de la fermeture de l’auberge : adieu la tarte aux myrtilles !

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Des avalanches grondent sur les pentes du Luisin et le foehn tourne au vent. Il pleuvine lorsque je m’assieds dehors sur le banc de l’auberge, on entend en contrebas le ronflement de la Salanfe. Il y a plus d’un mètre de neige sur les toits de ces anciens mayens qui sommeillent en hiver comme autrefois, impossible de tracer des pistes sur des pentes bien trop raides. 
Les barbes des vieux mélèzes mettent un peu de vert-de-gris sur le gaufré du paysage, blanc traversé d’encre noire. Le bruit de crécelle d’un gros geai fait taire les conversations des mésanges, Oscar tremble, il a froid. Je reviens par le même chemin, en prenant garde de ne pas glisser, comme à l’aller, dans les deux galeries percées au milieu du siècle passé, plongées dans la nuit et recouvertes de glace vive. 
A la bifurcation qui monte au col de la Matze, je lis sur un panneau jaune un nom qui fait rêver : Planajeur. Je le répète comme un mantra, et ce sont d’autres vallons, lumineux, qui me reviennent en mémoire, répondant tous à l’appel de ce nom, sans pente et sans fin.

Jean Prod’hom

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