Vico Santa Maria delle Grazie a Toledo

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Je dédie ces mots à la vierge Marie mon coeur je m’envole et m’approche amoureux comme un enfant je rêve à tes bras offre-moi quelque chose fais-moi oublier la méchanceté la malveillance la guerre donne-moi un peu de paix un peu d’amour je n’en puis plus éclaire cette confusion et le monde désert je te le demande entoure mon coeur mon âme mon souffle mon amour protège-moi comme une mère protège son enfant je t’en prie laisse-moi dormir.

Salvatore Prudele (Saint-Valentin | 14 février 2012)

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Il s’appelle Marco Prudele et habite le rez du Vico Santa Maria delle Grazie a Toledo. J’ai passé devant chez lui samedi passé, la nuit était tombée, la porte de sa loggia était grand ouverte, un poste de télévision distillait une émission de variétés de l’autre côté de la ruelle déserte.
Je guigne, Marco m’invite à entrer dans l’antre de son frère. Son frère c’est Salvatore, il dort, fatigué, très fatigué. Il a subi une opération du coeur en 2012. Un brave gamin qui se trouvait sur l’Achille Lauro lorsque celui-ci a été détourné en 1985. Il a fait un peu le maçon en Autriche, en Allemagne, au nord de l’Italie. Mais il n’a rien redémarré de sérieux, c’est aujourd’hui un pensoniato, alors sans rien dire à personne il a transformé sa maison en vaisseau fantôme, lumineux, il a collé sur les murs de sa chambre et de son plafond ce qu’il a trouvé dans la ville, les textes qu’il a rédigés. Salvatore a neuf frères et soeurs, mais c’est lui, Marco, qui s’occupe du cadet et de cette mère qu’ils aiment tant.
Autrefois c’était l’héroïne et la camorra, plusieurs morts chaque jour. Aujourd’hui c’est les incivilités des enfants. On était des scugnizzi, les choses ont bien changé. Pas Salvatore, il est resté le même, il aime toujours autant sa mère et illumine sa chambre de bouts de chandelles et de tickets de métro, de saintes et de publicités, de cartes de loto et de colliers. Salvatore n’a pas changé depuis le temps, il laisse sa porte ouverte du printemps à la fin de l’automne.
Tu sais, me dit Marco, ici on n’est rien, on est grec et espagnol, c’est nous qui avons fait Naples, je la connais, je te la ferai voir demain. On montera au Vomero.
Marco a les yeux brillants des possédés, il piaffe, respire et pleure. On s’est donné rendez-vous l’année prochaine. Marco me montre encore de l’autre côté de la rue les portraits de ses parents, de cette mère que lui et son frère aiment tant, elle est à l’image d’une sainte, d’une ville. Je ne verrai pas ce soir Salvatore, il n’a pas bronché sous son édredon, il fait le mort.

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Jean Prod’hom