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Taquiner le goujon, c'est courir le risque de tomber sur du gros, du très gros, du si gros qu'on ne saurait espérer à la fin autre chose : que le fil casse. Mais c'est aussi courir le risque inverse, celui de ramener sur la rive du fretin, menu, si menu qu'on ne saurait envisager autre satisfaction que celle ambiguë de le remettre à l'eau. Que nous reste-t-il donc ? La possibilité miraculeuse de nous en aller chaque matin sur le chemin de halage, sans l'aide de personne, et nous réjouir d'en revenir bredouille, ni victime ni bourreau. Mais est-ce bien raisonnable ?

Jean Prod’hom