Dimanche 6 décembre 2009



Insipide la pluie crépite sur le toit des maisons; ne surnage dans la boue des bas-côtés de la route aucun des souvenirs que la terre a bus avec les derniers tas de la première neige. Sans goût les hommes laissent des traînées, comme sur un tableau noir mal lavé que la chaleur du poêle n’arriverait pas à sécher, ils font les essuie-glace sans rien vouloir savoir du jour.
On ne voit rien dans cette nuit, on a beau fermer les yeux, rien. Pas même le coeur d’un arbre foudroyé qui flamboierait, quelques coings luisants près d’une fontaine, une grappe de raisin dans la pénombre, les ruchers de la terre.
Pourtant qui tend l’oreille entendrait, tout là-haut sur le plancher d’un coin des combles, un enfant assis en tailleur qui chantonne en nommant son frère et sa soeur. Ils surgissent d’entre les pages d’un album de photographies que l’enfant tient comme un accordéon.

Jean Prod’hom