Col de la Matze

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Van d’en Haut / 13 heures

Il fait beau, la nuit a été bonne, aucun risque d’avalanche sur le chemin qui mène au col de la Matze. Encre noire au fond du vallon et silence épais tout autour. A Van d’en Haut, les volets des mayens sont clos, volets jaunes, verts, volets rouges, volets bleus. Le soleil bascule derrière le Luisin à la hauteur de Van d’en Bas.
Personne dans l’auberge, des chansons anglaises à la radio, Augustine les connaît par cœur. Raphaël – à moins que ce ne soit Sébastien – demeure invisible, le travail ne manque pas à la cuisine; ils ont eu du monde tout le dimanche: le gros de la troupe venu d’en haut, à peau de phoque par la Golette, les solitaires d’en-bas, appuyés sur leurs bâtons depuis Les Granges. Il leur reste une soupe à l’oignon, deux morceaux de fromage – du bleu fourré à l’ail des ours –, des croûtons, quelques cerneaux de noix et des graines de courge; deux tranches de pain et un carré de beurre. Ça mérite le détour.
Le chemin de Van d’en Bas à Planajeur chante sur une portée à pente douce, la neige a fondu et le ventre mou de la terre fait des vagues. On pourrait aller ainsi jusqu’à Emaney.
Le temps a passé, plus de dix ans qu’on ne s’est pas revu, Marianne écrit sur la terrasse du Clair de Lune. Le temps presse, elle souhaite envoyer sa contribution – un abécédaire d’une quinzaine de pages – ce soir encore. Elle enseigne à Lausanne et vit aux Granges de Salvan, on échange nos numéros de téléphone. Elle essaie comme tout un chacun de tenir sa vie par les deux bouts. Ça a l’air de jouer.

Fondation Gianadda

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Martigny / 15 heures

Chacun y va de sa contribution, modeste, exhibe une combinaison, inédite, quelque chose de bien, quelque chose de beau, quelque chose d’original. Quelque chose de drôle ou de sérieux, dans le sens de ce qui se dit ou à contre sens. Jusqu’à plus soif.
Trop c’est trop, cette profusion fait barrage, occlusions et catastrophes menacent. Besoin de démolisseurs, capables de faire trembler les bibliothèques sans toucher aux livres, de creuser à même les espaces hostiles, de miner les bons mots, les enseignements, les trouvailles.
Car enfin, c’est un mur de pierres sèches qui soutient le ciel, c’est une phrase unique, préparée par les livres qu’on a aimés et encadrée par ceux qu’on ne lira pas, qui nous restituera ce que les livres et leur sang-froid ont enseveli.