Février 2023

Rural

L’étang

Devant le rucher à Gillabert

Carro

L’association Petrarque-Montebello à Colonuzelle. Au loin le Ventoux.

Du côté des sources du Gillabert

Betteraves fourragères

Dégel à l’étang


Vallon d’Erevine, Calanque d’Erevine, La Couronne

Janvier 2023

Visite au Riau. Feu !

De chez Dukas

À l’ouest


Premiers forsythias à Oron. Inconscients ! Personne ne les a avertis ?

Les Ormonts depuis Pra Cornet

Lioson

Peut être une image en noir et blanc de 1 personne, position debout, océan et ciel
Lützerath :
« En soi, en force, on ne fait pas trop le poids ; mais on a des idées. Et puis voilà, on fait tout ce qu’on peut. En tout cas, on ne va pas baisser les bras. » (Rust)



Au jardin

Au jardin

Le Riau, l’étang, la bise

Bois Vuacoz

Décembre 2022

Tussilages du nouvel an au bois Vuacoz

Au Riau

25 décembre

« En revanche, les êtres qui, dans l’abondance du bien-être, ont tiré leur vie durant le char de la peur en soupirant et en gémissant tout de même, en cherchant constamment la satisfaction sans la trouver, sont impardonnables si, dans l’intention de rendre leurs enfants heureux, il croient devoir les atteler au même char de la peur et ne connaissent pour eux aucune béatitude à l’exception de l’argent. »
(Jeremias Gotthelf, Anne Bäbi Jowäger)
« La FIS a procédé vendredi au contrôle des conditions d’enneigement à Wengen et à Adelboden. Elle a donné son feu vert aux courses de l’Oberland bernois. »

On dit souvent, sans bien savoir pourquoi, la mauvaise saison.

Octobre 2022

Le prix Nobel n’est souvent pas un cadeau.
Il ne le sera jamais dans certains domaines, et c’est heureux.

Dorigny, rien n’est donc perdu.
Suffit de bien peu.

Bois Vuacoz

Chez les Bolzes de Fribourg

Un 21 octobre au Riau

Du pont des Ciernes Picats

Du côté le Lioson

Eiger au nord-est et Balmhorn au sud-est, du sommet de Laitemaire

Septembre 2022

Pangée

Sète

Lac d’Aiguebelette

Je cherche désespérément le texte que Jean Villard Gilles a écrit en 1960 pour le théâtre du Jorat : La Grange aux Roud. Pas de trace dans les bibliothèques publiques, ni sur le NET. Pouvez-vous m’aider ?

Travaux d’automne

Jorat | Bois Vuacoz

Jorat | Bois Vuacoz

Mézières

Elles se préparaient hier. Crois bien qu’elles sont parties.

« Qu’on fasse, dit Horace, perdre à un poème toutes ses jointures et ses mesures, il ne perdra point pour cela de sa qualité… »
(Montaigne, Essais I. XXVI : Sur l’éducation des enfants)



« Nous connaissons aussi des régions très fertiles en vivres de toutes les façons où cependant les mets les plus ordinaires et les plus savoureux, c’était du pain, du cresson et de l’eau. »
(Montaigne, Essais I.XXIII : Sur la coutume et sur le fait qu’on ne change pas)

« Durant une heure encore, je contemplai les crêtes lointaines, tandis que tout autour de moi les oiseaux chantaient et picoraient en paix. Prisonnier de mes horizons limités, j’enviai au faucon sa vision sans bornes du ciel. Les faucons évoluent sur les reliefs de l’air. Leurs yeux sphériques ignorent la platitude grise de notre vision humaine. »

Juillet 2022

Merci à Florence Grivel de s’être penchée un instant encore sur quelques-uns des restes de la vaisselle du monde.


Retour là où ça a commencé : août 1988, Kerity, Finistère.
Nouvelle pêche ce soir, mais aussi, certainement, dernière pêche. Plus personne n’a confiance en l’océan ; on ne le nourrit plus. On lui préfère les déchèteries. Et c’est effroyablement triste.


Audierne


Si familière et si incertaine, l’île de Sein.
Sur laquelle je termine La Déménagerie (Jean-Loup Trassard), celle de la tribu des Fourboué de la Mayenne à la Sarthe, terres toutes proches et pourtant, elles aussi, si lointaines.
Avec l’impression très nette que certaines îles et les mondes paysans emmènent notre avenir, intact. Rien ne serait donc perdu ?


Ombre à Porz Even


La Loire en amont de Nevers. Près de Decize. Encore inconnue.


Une merveille !
« C’est point qu’il était savant, le grand père Alexandre, il n’avait sûrement pas le certificat, je ne lui ai pas demandé, je ne sais même pas s’il en était question dans ce temps-là, mais il savait faire attention.
Oui, observateur, on peut dire comme ça. Alors je croirais bien qu’il voyait des choses que les autres, même mon père qui était son gars, ne voyaient pas, ils ne s’intéressaient pas. Il me disait : « Regarde ! » La différence entre des feuilles de bourrier qui se ressemblent et pourtant ne sont pas la même plante, la couleur des œufs dans les nids, un poil de lièvre accroché à une ronce, ou que j’seu t’i.
Il m’a appris à regarder. Après, bien sûr, avec le travail qui presse, on n’a pas toujours le temps, mais maintenant je reviens à faire attention, j’ai le temps. Oui, enfin… faut que je me dépêche quand même ! Mais, c’est vrai, maintenant que je suis arrivé dans ses âges je pense à mon grand-père, plus qu’avant. »


Parenthèse

Daniel Maggetti
La Veuve à l’enfant
Éditions ZOE
2015

Dès la première page, on fait la connaissance d’Anna Maria, une veuve qui maraude pour nourrir Pierino, son petit-fils – tous deux relégués au fond d’une vallée sans âge, au sein d’une communauté prise dans un roncier de passions, embarrassée par d’anciennes dettes et un passé qui ne passe pas. 
Mais on fait aussi la connaissance, dès cette première page, de don Tommaso Barbisio, un cavalier dont le visage nous est dérobé, un lettré d’Italie mis au ban du monde civilisé, un habile théologien réduit par sa hiérarchie, en raison d’amitiés suspectes, au rôle subalterne de curé dans un renfoncement des Alpes. 

*

Une page a suffi pour que ces deux mondes entrent en contact ; ils se frôleront jusqu’à la fin, sans jamais pourtant échanger leurs attributs. Car la montagne que don Tommaso Barbisio découvre dans ce coin des Alpes n’est pas celle à laquelle il a été initié, celle des psaumes et des verts pâturages dévalés avec ses amis séminaristes ; elle n’a pas non plus la saveur du lait que d’aimables paysans leur servaient dans leur petit palais où ils se retiraient parfois. 
La montagne de La Veuve à l’enfant n’a en effet pas la transparence de l’air, du ciel et des torrents ; ce n’est pas la montagne des romantiques mais celle de novembre et de la Toussaint, des pierres grises, des ravins et des eaux limoneuses ; c’est la montagne des chicanes et des infortunes, des arriérés, des coups durs et des vengeances ; c’est une montagne noire et muette qui fait taire l’éloquent théologien, l’enfant chéri de Rome, le commentateur émérite des Pères de l’Église promis aux plus hautes fonctions, un peu artiste un peu poète, amateur de littérature, de musique et de soutanes bien taillées, qui sera condamné, pendant l’année que durera son exil, à manger des châtaignes et des noix, à dormir sur une housse de chanvre grossier, remplie de feuilles sèches, dans une cure glaciale que le soleil ne réchauffe pas.
Si le théologien survit, c’est parce que, curieux, il devine les événements qui structurent et cimentent la vie de cette communauté paysanne, les noeuds qui tout à la fois la divisent et la rassemblent. Il usera de tout son temps pour éclairer l’histoire de ce collectif d’un autre âge, fouiller les registres de la paroisse et recopier les informations qui y dorment depuis plus de deux cents ans. Il en esquissera le contour et en lèvera les secrets, comblera ses silences. Il s’informera auprès d’Anna Maria, de son petit-fils et de leurs ennemis pour documenter l’histoire locale, à laquelle se mêle la grande histoire, celle de l’essor industriel du XIXe siècle, de l’exode rural et de l’émigration.
La Veuve à l’enfant c’est, entre histoire, récit documentaire et roman, le compte-rendu d’une parenthèse, au milieu de laquelle un lettré, en réalité analphabète, réapprend à lire en faisant un détour dans un monde qui n’est pas le sien mais auquel il s’attache. Chemin faisant, il se dévoue à sa tâche – messes, baptêmes, fêtes votives, enterrements, mariages – et, lorsque le printemps puis l’été s’installent, il célèbre avec empressement et ferveur la fête de la Madone du Carmel. 
Le lecteur songe alors qu’un nouveau roman va naître, que les ennemis de toujours vont se réconcilier, que la communauté va s’apaiser et le curé se convertir ; il se prend à espérer que cette parenthèse ne se refermera pas, que don Tommaso Barbisio prolongera son séjour et acceptera ce monde où l’horizon disparaît derrière les montagnes mais où l’existence s’ouvre à une verticalité insoupçonnée, sans fard, pleine de beautés et d’aspérités, d’amour, de rudesse et de violence, que le théologien lettré s’était contenté de lire dans les tragédies grecques. 
Don Tommaso Barbisio comprend alors qu’il existe là, dans ces communautés oubliées, une autre spiritualité où on ne s’ingénie pas à déguiser les choses sous des sentiments avouables, une spiritualité plus ouverte et moins prévisible que celle des rites étroits auxquels il ne croit plus, une spiritualité qui réconcilie bêtes, hommes, livres et musique, sur une terre faite de soleil d’or et de soleil noir, où la lumière croît et le relief s’adoucit au printemps.

*

Mais don Tommaso Barbisio reçoit au lendemain de la fête de la Madone du Carmel une lettre de libération ; son exil s’achève et il s’en réjouit. Déception du lecteur tandis que le curé prend congé d’Anna Maria. Le roman reprend pourtant ses droit lorsque celle-ci lui confie son petit-fils, pour le soustraire à la vie qui lui est promise et lui offrir la possibilité d’en écrire une autre. Le théologien accepte, réitérant ainsi le geste dont il fut autrefois le bénéficiaire et qui lui permit d’échapper à sa destinée en accédant à cette seconde famille que fut l’Église. 
Don Tommaso Barbisio et Pierino partent tous les deux le 16 octobre ; le premier laisse derrière lui les maisons de pierre, les clochers mal bâtis et les fondrières qui lui ont enfin donné l’occasion de prendre conscience de l’étendue de ses naïvetés et de ses ignorances. Quant à Pierino, il quitte les chaînes qui le liaient à son passé. 
Mais cet abandon obligera le petit homme à faire à son tour un pas de côté et à ouvrir demain une parenthèse, celle qui lui permettra de remettre la mains sur ce passé dont nous avons à nous affranchir pour accéder à la liberté, mais avec lequel nous avons rendez-vous, pour renouer avec notre provenance et les circonstances qui nous ont vu naître, pour nous en émerveiller et y consentir. Comme don Tommaso Barbisio et l’auteur lui-même dans son retour au pays natal. 

Juin 2022

Au milieu des oeuvres perdues, de la mémoire et du présent, Judith Schlanger continue à répondre à des questions réelles en même temps qu’improbables : Mon identité, demandait-elle en 2019, se confond-elle avec le cours de ma vie ? Comment comprendre que je suis et ne suis pas ma vie ?

« Maintenant ne se confond avec rien d’autre et pourtant j’y retrouve aussi le goût d’autres moments de conscience, de spectacle et de jugement. Comme tout présent, maintenant se tient au bord de l’inconnu, mais ce n’est pas en soi une expérience inconnue. Je ne sais pas où cette seconde me mène, mais je le reconnais et m’y reconnais. 
Et parfois la distance me découvre encore autre chose. Il m’arrive d’avoir accès à quelque chose qui est plus basique que le biographique ou le psychologique, quelque chose de secret et de discontinu qui est le pur mental, la conscience impersonnelle, le sujet au-delà du sujet. C’est une instance indifférente à mes intérêts et pourtant attachée à moi par une même pure et vive inertie d’être qui nous maintient… elle n’existe pourtant que tant que je vis » au milieu des oeuvres perdues, de la mémoire et de l’insaisissable présent au milieu des oeuvres perdues, de la mémoire et de l’insaisissable présent.

Fin de journée au Riau.

Fête de la poésie et de la musique à La Sarraz.

Ramasseur de graines solitaire, guetteur des bêtes, apprenant à connaître les règnes et le vent avec mes cinq sens dans un vaste jardin, quelques prairies, j’ai l’impression d’avoir commencé par être, petit, une sorte d’homme préhistorique.

À l’ouest du Riau.

Mit Yves Raeber in Schaffhausen

Le 30 juin 2022, nous sommes allés, Yves Raeber et moi, parler de Novembre et de traduction à des élèves du gymnase de Schaffhouse. Je n’avais pas parler allemand depuis des décennies. Je m’y suis risqué :

 

Liebe Schüler,  

Mein Name ist Jean Prod’hom, ich wohne in Le Riau Graubon, einem Weiler in der Nähe von Lausanne, in einer ländlichen Gegend. Wie Sie festellen werden, habe ich nur in der Schule Deutsch gelernt, es ist summarisch… was ich heute bedaure.
Die Schule ist mir jedoch nicht fremd, denn nach einer klassischen Schullaufbahn und einem Studium der Philosophie und Literaturwissenschaft an der Universität Lausanne, habe ich etwas mehr als 30 Jahre lang Französisch für fünfzehn – und sechszen-jährige Schüler unterrichtet. 
Ich war, so glaube ich, ein gewissenhafter, aber rebellischer Lehrer. Ich hatte die geheime und hartnäckige Hoffnung, die Waadtländer Schule zu verändern, sie lebendiger und aktiver zu machen. Und so, von einem zum anderen, die Welt zu verändern. Mit einem sehr sehr, sehr fragwürdigen Erfolg. 

*

Das wurde mir, im Jahre 2008, im Alter von 53 Jahren, bewusst. 
Damals ahnte ich, dass ich, wenn ich auf diesem Weg beharrte, von hypothetischen, tiefgreifenden sozialen Veränderungen träumte und mich ausschließlich der Schule und den Schulkindern widmete, nicht nur Gefahr lief, in Missgunst zu verfallen, sondern auch etwas Wichtiges zu verpassen : mein eigenes Leben.
Als Antwort auf diese sehr reale Gefahr habe ich begonnen, täglich in einem Blog zu schreiben, um mir einen Raum für Ausdruck, Reflexion und Entdeckung zu schaffen. 
Ich muss betonen, dass ich zu keinem Zeitpunkt meines Lebens das Lesen und das Schreiben verehrt habe, ich habe sie nie als Zweck betrachtet, sondern als Zugang zum Leben, das uns immer wieder entgleitet. Ich schreibe also heute nicht aus Berufung. Und wenn das Lesen und das Schreiben für mich wesentlich geworden sind, dann sind sie es wie ein Stock für einen hinkenden Menschen. 
Das Schreiben ermöglichte es mir, dem Arbeitsleben, dem ich den Großteil meiner Zeit widmete, zu entfliehen, um zu schauen und zu atmen, in die Fülle meines Lebens eine kleine Leere zu graben.
Ich lernte damals, auf diesem Weg, dass das Leben nicht nur ein harter Kampf gegen das Vergehen der Zeit und den Tod ist, sondern auch etwas Einzigartiges und Unbekanntes, von dem ich fast nichts wusste.

*

Zufällig schlug mir ein Verleger, der die täglichen Texte las, die ich in meinem Blog veröffentlichte, und insbesondere die Texte, die sich auf die Geschirrstücke bezogen, die ich seit 30 Jahren am Wasser sammelte, vor, ein Buch über diese Reste des Weltgeschirrs zu schreiben. Wird es Tessons sein, das 2015 erscheint.
Zwei Jahre später beschloss ich, in den Vorruhestand zu gehen, um noch mehr Zeit für das andere Leben zu haben, das sich neben meinem Berufsleben abspielte.
Ergebnis ? November ! geschrieben und veröffentlicht im Jahr 2018. 
November ist die Erzählung dieses ersten Jahres im Ruhestand, in dem ich mich von der Welt zurückziehe, ohne mich jedoch von ihr abzuwenden ; von der ich mich entferne, um sie zu beschreiben, um eine Existenz, eine Form, einen Sinn und eine Schönheit zu finden. Eine Welt, in der ich mich bewege, an die ich gebunden bin und von der ich abhänge, eine Welt, von der ich mich eines Tages lösen muss, die ich denen überlassen muss, die nach mir kommen : die Orbe-Ebene, seine Bewohner, das Seeland, seines Tiere, das Einzugsgebiet der Aare, ihre Vergangenheit, ihre Zukunft.

*

Aber auch wenn sich November um die Region Seeland dreht, dreht diese Erzählung sich auch um den Tod eines Freundes. Und es ist die Erwartung dieses Todes, die die Macht hat, den Realitäten, die sich präsentieren, eine weniger sichere, zerbrechlichere und geheimnisvollere Existenzweise zu verleihen. 
So sehr, dass mir bei mehreren Gelegenheiten die Zuckerrüben und Findlinge als voll von persönlichem Leben erschienen .
November ist also kein dokumentarisches Buch, das die Wahrheit über eine Region Sager würde, und auch kein Buch über Metaphysik, Philosophie oder Weisheit. Es ist vielmehr ein Buch, das es mir ermöglicht, die Welt, die mich umgibt, und die Menschen, die sie bewohnen, zu entdecken und entdecken zu lassen, ohne dabei zu dick aufzutragen, so dass dieses Buch keine Gewissheit gibt. 
Dieses Abendteuer und dieses Buch haben mir (und vielleicht dem Leser) Möglichkeit gegeben, meinen Blick auf Dinge zu erneuern, die mir zu vertraut geworden waren, ihnen ein Leben zurückzugeben, selbst den trivialsten Dingen, und ihnen so eine Zukunft zu bieten.

*

Über die Tätigkeit des Übersetzens, möchte auch ich zwei oder drei Wörter sagen.
Denn Schreiben in dem Sinne, wie ich es verstehe, ist bereits Übersetzen. Es bedeutet, die Empfindungen, die ich hatte, die Beobachtungen, die ich gemacht habe und die Ereignisse, an denen ich teilgenommen habe, mit Wörter und Sätze zum Ausdruck zu bringen. In diesem Sinne ist November eine Übersetzung.
Aber November ist nicht die Übersetzung einer zwölftägigen Reise durch das Seeland, Wort für Wort, Schritt für Schritt ; November ist nicht das Aufschreiben von Notizen, die ich mir täglich gemacht hätte, oder die rückblickende Niederschrift dessen, woran ich mich erinnert hätte.
Denn dass es zwei Dinge gibt, zwei Arten des Seins, die so verschieden sind : das, was man erlebt hat, das Unmittelbare, und das, was man später darüber sagt, den Text, den man daraus macht. Und der Übergang vom einen zum anderen, seine Übersetzung, zwingt oft zu Umwegen, die den Schreibenden von dem, was er vor Augen hat, wegführen, ihn aber am Ende wieder dorthin zurückbringen.

*

Ich möchte als Beispiel einen Moment erwähnen, den ich erlebt habe, und die Umwege, zu denen er mich gezwungen hat.  (150-154).

*

Es ist der 13. November 2017. Seit sechs Tagen bin ich unterwegs. Ich war am Morgen in Portalban und komme mittags in Salavaux, am Ende des Murtensees an. Ich bin etwas müde, sodass ich einige Minuten auf einer Brücke halte, von wo aus ich Folgendes beobachte :

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Ich dachte nicht viel nach. Bis ich den Fluss erkenne. Läuft mir ein unmerklicher Schauer über den Rücken : Oh, die Broye hier ? Wie wir uns wiedersehen ! Wo bist du hingegangen ? 
Nichts mehr. Also ich drehe mich um und erblicke eine Baustelle :

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Mammutarbeiten, die mich stutzig machen und von denen ich ein Foto mache. 
Ich atme tief durch, stehe auf und, entlang des Murtensees, gehe weiter. Bis Sugiez.
Am Abend, auf der Terrasse der Pizzeria Bella Italia mache ich mir ein paar Notizen auf meinem iPad, denke an die Minuten auf der Brücke, notiere, wie glücklich ich war, als ich die Broye erkannte, und lege das Foto von der Baustelle beiseite. 
Dann schaue ich auf einer Karte nach, suche die Broye und entdecke, dass die Petite Glâne in der Nähe der Brücke mündet ; ich hatte sie nicht gesehen, aber ihre Anwesenheit regt meinen Appetit an. Ich esse und gehe zu Bett. Meine Reise wird noch sechs Tage dauern.
Beachten Sie, dass ich das Datum des Brückenbaus (1897) nicht notiert habe, einfach nur weil ich es nicht bemerkt habe. Dieses Datum, die Brücke und der Stahl hätten mich interessieren und meine Reise neu ausrichten können, und mehrere Aspekte dieses Buches verändern können. So war es nicht. Weder Brücken noch Stahl werden im November erwähnt.

*

An alle diesen drei Punkten, Glück, Baustelle und Petite Glâne, werde ich in den nächsten Monaten, nach meiner Rückkehr, arbeiten. 
Zunächst, werde ich versuchen, das Glück, das ich auf dieser Brücke empfunden habe, in Worte zu fassen. Um diesem Augenblick eine Form zu geben, werde ich zu den Quellen des Flusses zurückkehren, der an meinem Haus vorbeifließt, und seinem Lauf bis zur Broye folgen. Nach Lucens werde ich auch den Ort wiederfinden, an dem sich die Broye meiner Kenntnis entzieht und ihr Leben, ohne mich, lebt.
Zweitens, werde ich mich mit dieser riesigen Revitalisierungsbaustelle beschäftigen. Ich werde nach Salavaux zurückkehren, um mit den Arbeitern sprechen, mich für die Budgets interessieren, die Anwohner befragen und weitere Revitalisierungsgebiete ausfindig machen, die ich an anderer Stelle im Buch erwähnen werde.
Drittens, werde ich den Fluss Petite Glâne hinaufgehen, von der Brücke bis zur ehemaligen landwirtschaftlichen Siedlung Payerne. Dort werde ich im alten Obstgarten eine Birne marodieren. Ich werde  auch über diese Kolonie lesen, über die Trockenlegung der Sümpfe und die ersten Rübenpflanzungen, die ich im vierten, fünften und neunten Kapitel des Buches erwähnen werde.

*

Sie werden es verstanden haben : ich habe all dies und noch viel mehr gesammelt. Ich habe auch viel weggeworfen. Einige Sachen habe ich an anderer Stelle in der Erzählung neu verteilt. Bis zu dem Punkt, an dem jedes einzelne Kapitel und die Gesamtheit der Kapitel für mich stimmig waren. Als alles seinen Platz hatte. 
Das bedeutet, dass dieser Bericht, der zwölf Tage dauert, in Wirklichkeit der Bericht einer Reise ist, die zwölf Monate dauerte. Zu Fuß, im Auto und im Zug. Er wurde durch Notizen, Lektüre, Fotografien, Begegnungen und Überlegungen genährt, die alle Umwege sind, um das wiederzugeben, was mir widerfahren ist, aber auch das, was ich entdeckt habe : das Einzugsgebiet der Aare, Rüben, Sümpfe, Zement, Gefängnisse, Stieglitze, Kalkstein… 
Von den zwei oder drei Minuten auf der Broye-Brücke und den Umwegen, zu denen sie mich gezwungen haben, sind mir vier Seiten geblieben, mit Einige Echos in anderen Kapiteln des Buches. Diese vier Seiten geben am besten wieder, was ich erlebt habe und sagen am genauesten, was ich schliesslich sagen wollte. Es ist zu viel und zu wenig, aber ich konnte es nicht besser machen.

Mai 2022

JEAN-LOUP TRASSARD sur l’herbe, au bord de mer ou dans les combles.
Deux petites poches à ma culotte courte. De l’une je sortais pour le regarder l’objet parfait et énigmatique. J’étais sur l’herbe de notre pré, celui qui touche le jardin, où sont quatre poiriers à cidre, et j’avais ce souvenir du lointain. Absolument mystérieux. Bleu assez pâle, ou surtout terni par l’usure. Un coté bombé, l’autre moins, c’était presque rond. Rencontré entre vagues et plage… je me souviens que je ne savais plus… pas une pierre ou alors très riche, pas un coquillage malgré formes, couleurs, nacres versés sur le sable par le bord agité de la mer où je n’entrais pas. Dans ma paume cette presque boule usée, c’était parcelle de l’inconnu sans contours que je tenais. (Tardifs instantanés)


La ferme, le balai, quelques jours dans l’Aubrac, le traquet, le joug, le travail des bœufs, le fumier, les chemins. Avant qu’on n’y comprenne plus rien.

Grignan -Sauzet : 2 – 1


Valréas


TRUINAS | sacristie : … ce que le soleil m’a laissé, la nuit


Au Riau / Grande Chélidoine


Pourquoi les traits d’un paysage finissent-ils par tant s’accorder ?


Au Riau / Sceaux de Salomon


Mélique / Avenue de l’Ancyse / Bagnols-sur-Cèze


Grillon


Gif-sur-Yvette | le dimanche 23 mai 2022



Cher Jean,

J’ai rêvé, comme Rambert, d’être changé en martinet. Je continue. Ils dorment en vol, soutenus par les souffles de la nuit. J’ai parfois entendu, vers minuit, leur trille dans l’azur assombri.

Figure-toi que c’est en juillet 1978, deux ans avant toi, seulement, que j’ai lu, au prix des pires peines, La Phénoménologie de l’esprit. Si je n’ai pas été disloqué, à peu près anéanti, par l’idéalisme absolu, c’est que j’avais lu Marx, qui règle son compte à Hegel en trois foudroyantes pages.

De son voyage dans les Alpes, je ne savais rien, que les deux mots qu’elles lui ont inspirés : « Cela est ».

Et puis il y a ceux, mémorables qu’il a adressés à ses compatriotes lorsque l’armée française, après avoir écrasé les Prussiens sur le plateau du Landgrafenberg, a fait son entrée à Iéna : « Regardez ! C’est l’Esprit du monde qui passe, à cheval ».

Pas souvenir d’un mois de mai aussi beau, aussi chaud que celui qui s’achèvera bientôt.

Amitié

Pierre

Vie du poème

Dans sa Vie du poème, Pierre Vinclair pointe du doigt les dangers qui menacent les hommes lorsqu’ils demeurent aveugles au double mouvement de leur existence. 

Car nous ne sommes en vérité pas un mais deux, jetés dès le commencement hors de nous-mêmes : dans le monde et dans la langue. Et ces deux modes d’existence ont des effets considérables sur nos vies, puisqu’ils donnent l’occasion à l’immédiat et au disparate, dont nous faisons continument l’expérience, de renaître et de reparaître dans une poignée de mots, capables de leur donner forme, tonalité et cadence.

Mais si la langue met ainsi à notre disposition un véhicule capable de nous faire toucher du bout du doigt le monde, en lui offrant un lieu où faire halte, une page où surgir, la langue peut aussi nous en éloigner et nous l’aliéner à jamais.

C’est dire que la tâche de l’homme est délicate, puisqu’il lui revient de dire le monde, non pas celui qui fut ou l’immuable, le monde perdu ou qui ne sera pas, mais le monde tout proche, celui qui vient à nous et auquel on s’ouvre ; le monde qui n’est pas encore et que nous balbutions, que nous cherchons à faire nôtre et à partager en l’offrant et en le soumettant à nos proches ; le monde qui sans cesse prend les devants et auquel nous mêlons nos pas ; le monde qui nous affecte, celui de nos attachements et de nos dépendances, mais aussi celui du tout-venant, celui sur les rives duquel nous accostons au réveil et dans lequel nous vivons aux aguets, jusqu’au soir, dans sa parution et sa nomination.

Monde-poème, à l’équilibre fragile et mesuré, créé pas à pas et mot à mot, sans cesse renouvelé, repris et relancé. Et nous au milieu. Ici en deux et à l’avant de soi.

En lisant « Vie du poème », j’ai plus d’une fois pensé à André du Bouchet.

Avril 2022

Forel-Lavaux


Bretonnières

Jaunes et en concertation :
primevères, ficaires, dorines et populages.
Qui dit mieux ?

Etienne Barilier revient dans un récit lumineux,
à bonne distance des croyants menacés par la crédulité
et des athées par les platitudes,
sur son héritage de fils de pasteur
et sa rencontre rédemptrice
avec une femme catholique.

Poulailler
à Croy

Au Riau


Mars 2021

L’homme aurait-il pris de réelles mesures
si ses activités avaient conduit à un refroidissement
plutôt qu’à un réchauffement climatique ?

Au Riau

Au Riau / l’étang / débâcle

Au Riau / l’étang / œufs pochés de têtards

Gif-sur-Yvette | le samedi 15 janvier 2022



Cher Jean,

C’est sous de sombres auspices que s’annonce 2022, sanitaires, politiques, sociaux… Pour la première fois, les jonquilles ne sont pas sorties et on s’interroge. Qu’appréhendent-elles donc ?

Le loup est réapparu en Corrèze après un siècle d’absence. Il a dévoré deux béliers, égorgé des moutons dont, fin gourmet, il n’a consommé que le foie. Ca va pimenter la vie somnolente de la campagne.

Bonne année envers et contre tout.

Pierre