Dimanche 19 avril 2009

Tandis que que toute morale aristocratique naît d’une affirmation triomphante d’elle-même, la morale des esclaves dès le principe dit « non » à un dehors, à un « autre », à un « non-moi »: et ce « non » est son action créatrice.

Friedrich Nietzsche, La Généalogie de la Morale, 1, X

En renonçant au mode réactif – au oui mais –, par une profession de foi d’abord, par honnêteté ou nécessité ensuite, on se condamne à l’action et à l’exercice de l’assentiment.
Mais peut-on raisonnablement aujourd’hui se livrer au grand oui, celui dont Nietzsche a fait le signe de ralliement des musiciens, des poètes, des hommes libres et solitaires, le oui des voltigeurs? Ne sommes-nous pas les obligés d’une nouvelle donne qui nous invite, sans jamais nous précipiter dans le ressentiment, à nous faire les chantres du petit oui, le oui murmuré, à peine solitaire, le oui sans écho, modeste, le oui qui dure, le oui de la petite métaphore et de l’incomplet, un peu négligé, le oui élémentaire auquel le corps s’abandonne lorsque l’âme projette celui-ci en avant?
Peut-on espérer un traité des petits ouis? de ceux qui qui ponctuent le provisoire continué au sein duquel l’homme est immergé avant même qu’il ne marche?
Sera-t-on à même de donner notre assentiment complet aux petits ouis?

Jean Prod’hom