« Il y a quelque chose de magique dans cet endroit. J’ai l’impression d’avoir bâti du durable, comme s’il était impossible d’imaginer la fin d’un tel édifice. »
Vincent Mangeat, architecte de la Maison de l’Ecriture
Si, rappelle l’architecte, l’objectif de cette maison est d’offrir les conditions idéales pour écrire : six logements individuels aux ambiances et aux personnalités différentes – appelés cabanes – suspendus sous la canopée, un auditorium, une salle d’exposition, une bibliothèque, il est impossible, ajoute-t-il, d’imaginer la fin d’un tel édifice.
Il faut entendre le mot fin en plusieurs sens. Cette construction, d’abord, ne sera jamais terminée, il en va ainsi de tous les chantiers pharaoniques. En un second sens, ce temple de l’écriture bâti sur la pierre et solide comme le roc est conçu pour l’éternité. Soit. Mais il faut entendre le mot fin en un troisième sens, à l’origine des deux premiers et plus essentiel : une telle construction n’a pas de finalité concevable. Nul ne sait ce dont a besoin un homme qui écrit.
Pas même les architectes qui meublent en désespoir de cause l’espace et le silence de ce dont ils imaginent que l’homme qui écrit a besoin pour s’attaquer à l’inimaginable : un bouquet de fleur, les Alpes, l’altitude, la campagne, le repos, un fatras dont celui qui écrit commencera par se débarrasser pour y voir clair et accueillir les manques qui le nourriront. Rien n’y fait, les architectes se sont mis aux petits soins :
Les écrivains auront un coin pour rédiger. Ils pourront se l’approprier en posant leur ordinateur. Et il y aura aussi une grande table de travail au rez-de-chaussée.
Et puis, continue l’architecte, sur les plates-formes qui relient les étages, nous installerons des fauteuils et des lampes pour lire tranquillement.
Je me réjouis, vraiment, on m’accueillera un matin de juin selon les antiques lois de l’hospitalité, j’aurai fait acte de candidature – avec le risque évident que celle-ci soit refusée mais avec un solide atout : Montricher c’est à côté de chez moi, j’y réside depuis longtemps déjà. L’écriture est une parabole, juste à côté.
Jean Prod’hom