Savants fous lâchés dans la ville

Savants fous lâchés dans la ville, ils variaient jour et nuit les points de vue, fixaient des constantes ; ils copiaient leurs voisins, cachaient leur désarroi, faisaient des hypothèses ; ils multipliaient les réponses, modifiaient les circonstances, pariaient sur des variables, faussaient les résultats, demandaient des soutiens ; ils n’hésitaient pas à changer de camp ou de paradigme.
Jusqu’à ce qu’ils s’avisent qu’ils ne voyaient pas plus clair qu’au commencement et que la fatigue aurait bientôt raison de leurs ambitions. Celles-ci, à la baisse, leurs avaient entrouvert pourtant les portes du pays qu’ils n’avaient pas quitté, avec son chant, sa nuit, ses allées. Ils avaient alors laissé le gros de l’histoire aller pour son compte, s’étaient mis hors jeu en rejoignant la pente qui les conduisait de leurs petits pas de vieux consentants au bord du ruisseau, comme autrefois lorsqu’ils étaient copains.

servion_cailloux