La Vuachère

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Pully / 14 heures

Alors que je n’y songeais plus, remuant machinalement du pied la grève entre Lausanne et Pully, sur le point d’abandonner cette quête devenue soudain vaine, et peut-être de l’abandonner pour toujours, de tourner le dos à ces étranges rendez-vous, avec la crainte d’être amené à regretter un jour l’espèce de joie qu’ils me procuraient; alors que je me tançais sur le chemin du retour de ne pas m’être contenté d’un bouchon de liège, d’un vieux flotteur ou d’un morceau de terre sans visage; tandis que je me répétais ce que j’avais si souvent entendu, qu’il serait temps enfin de cesser ces occupations de va-nu-pieds, de passer à autre chose pour assurer ma rédemption, le monde s’est remis sur ses pieds. Sans avertir.
La cause, une petite pierre de rien du tout qui, d’un coup, a repoussé au second plan le dégoût, les courbatures, la toux et le rhume qu’un week-end au lit et des remèdes de cheval n’ont pas su apaiser; une pierre de rien du tout rouge, jaune, noire, avec dans le dos un rayon de soleil.
Une pierre multicolore manquée à l’aller que je me hâte, comme je l’ai toujours fait, de mettre au fond d’une poche, avant de la ressortir bouche bée, pris de vertiges: une pierre marquée aux couleurs du chardonneret.