Futur antérieur

L’ivresse qu’apportent en mai les fleurs du lilas ne parviennent pas à me ramener sur les vieux chemins et à entrouvrir les portails des jardins de l’enfance. Ni les fleurs de l’acacia ni celles bientôt du tilleul ne me permettront d’obtenir de rendez-vous par-delà le temps perdu avec ce qui n’a fait que passer et dont j’étais trop assuré autrefois qu’il reviendrait.

Quand les parfums opalins et laiteux de la rose et du chèvrefeuille me font signe, que je tente de m’en approcher et qu’ils se retirent avec la même nécessité – aveugle et obstinée – que celle qui oblige l’escargot biborne à rentrer ses cornes, je regarde à l’orient du côté des montagnes au collet enneigé, espérant saisir dans l’immobilité de la pierre ce qui s’est dérobé.
Je connais leur nom: Dent de Lys et Cape au Moine, Brenleire et Folliéran, mais elles ne m’ont pas attendu, ont quitté l’horizon et continuent sans moi. Je voudrais les rejoindre, sachant pourtant à l’instant même où je m’y apprête que ce que je leur prête, la promesse d’un bonheur absolu née ici même d’un éloignement continué se dérobe comme les fragrances de mai.
Il ne s’agit pourtant ni d’un rêve ni d’un mirage, mais de la réalité dont je dois me satisfaire, une combe et un parfum, une consolation, le souvenir de ce qui aura été.

Jean Prod’hom

Cohorte Ensemble d’individus suivis chronologiquement, à partir d’un temps initial donné, dans le cadre d’une étude épidémiologique.

Larousse médical 1998

Cohors, tis, f ( cf. hortus, χόρτος )
1 enclos, cour de ferme, basse-cour…
2 troupe [en gén.]: cohors amicorum… cortège d’amis; cohors illa Socratica… l’école de Socrate; cohors canum… meute de chiens; cohors febrium … l’essaim des fièvres…
3 [en part.] a) cohorte, la dixième partie de la légion… b) troupe auxiliaire… c) a,rmée…

Dictionnaire illustré Latin – Français, Félix Gaffiot, 1934

χόρτος, ου ( ὁ )
I lieu entouré d’arbres et de haies, enceinte: 1 enceinte d’une cour… 2 p. ext. sans idée de clôture, repaire de bêtes féroces…
II herbe… 1 fourrage vert ou sec… χόρτον ἔχει ἐπὶ τοῦ κέρατος, PLUT. Crass. 7… il a du foin aux cornes, c. à d. il est dangereux, p. allus. à la coutume de mettre du foin aux cornes des boeufs dangereux pour avertir les passants de s’en garer 2 p. ext. paille légère, balle… 3 plante alimentaire… 4 pâtures des animaux… 5 p. ext. nourriture grossière…

Dictionnaire Grec – Français, Anatole Bailly, 1950

XVIII

– Sale temps! renifle le cadre d’une petite entreprise locale assis près du poêle, les yeux vitreux, le regard vide.
Il se plaint laconiquement de son carnet de commandes, vide, la tête aussi, vide. Devant lui un verre vide. Et puis, pour couronner le vide dont il est l’animateur attentif, le nez plein.

Jean Prod’hom

Miettes

Nos villages coulent et rejoignent en aval les villes qui les aspirent.
Ils sont encore en soi mais ils ne sont plus pour soi, villages pour personne, à peine des amers qui scandent le grand espace globalisé.

Chacun est tenu de demeurer en équilibre sur un étroit chemin situé à égale distance du ventre de la mère et du désir du père, un chemin creusé par des forces opposées à égale distance du passé et de l’avenir, centripètes et centrifuges, le long duquel il lui appartient de marcher comme un funambule. J’en connais trop qui ont joué l’un contre l’autre.

– Qui es-tu? demande l’égaré à l’homme décidé qui le regarde dans le miroir.
– Ton père et ta mère! Et toi, qui es-tu?
L’égaré scrute le visage de son vis-à-vis, ses yeux se plissent…
– Je suis celui qui s’éloigne de l’un et de l’autre et, ce faisant, s’en rapproche.

Jean Prod’hom