Personne ne sait plus pourquoi

Personne ne sait plus pourquoi ni comment s’est imposée l’idée sotte et saugrenue de placer une horloge numérique LED, à chiffres rouges, sur le mur qui fait face aux élèves, dans chacune des classes des nouveaux bâtiments scolaires du Mont-sur-Lausanne.

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Il eût été préférable de remplacer cette vanité à laquelle les élèves qui ont décroché s’accrochent, sans en avoir conscience, comme Harold Lloyd aux aiguilles de l’horloge d’un grand magasin de Los Angeles, par un crâne entouré d’un sablier et d’une fleur qui se fane, comme me le suggère Philippe de Champaigne ; ou comme d’autres peintres le proposent, entre une bougie qui se consume et un verre vide, ou un miroir et ses reflets.
Il n’est pas trop tard pour bien faire, cette substitution n’aurait pédagogiquement que des avantages. Les élèves qui ne trouvent pas leur compte à l’école pourraient méditer sur l’un des points essentiels de leur vie et de la nôtre ; ou si cette méditation les inquiète, s’en détourner et se plonger dans le travail auquel ils sont invités, sans plus désormais vouloir accélérer le temps. Il y a des natures mortes qui réveillent, délivrent et éclairent.

 

Aux voyages et aux louanges

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Aux voyages et aux louanges, aux fêtes et au kérosène, aux célébrations et aux festins, à la réussite, aux aéroports, aux rires, aux hommages et aux palais, aux bonnes affaires et aux polars, elle préférait, disait-elle en plissant ses yeux rieurs, les lendemains de fête et les visites de Roger-l’amulette, Beauregard, et là elle ne souriait plus, les vieux crépis, les haies et les points d’orgue.

La vieille avait rejoint la communauté des solitaires

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La vieille avait rejoint la communauté des solitaires, présents, passés et futurs, lumineux et pensifs qui, répartis sur la terre aussi aléatoirement que les étoiles dans le ciel, offraient à ceux qui fonçaient jour et nuit dans l’obscurité l’assurance qu’ils pourraient toujours, quand ils le voudraient, ralentir et lever les yeux sur le présent, ce présent qui se projetait sur le reste de la vie comme un royaume ancien se projette sur les civilisations qui lui succèdent.  (José Carlos Llop)