Mézières / 9 heures
Ce soir c’est réunion de parents. J’y retrouve pour une petite heure l’école quittée avant l’été; de très loin. Les murs tiennent debout, tout est bien organisé, partout de la bonne volonté; mais aussi une espèce de crainte sur les visages, diffuse, dont je peine à identifier l’objet, comme si quelque chose s’était échappé du bâtiment, je ne sais pas quoi, j’ai beau me pencher, chercher, rien ne traîne, il n’y a rien, aucune promesse, nulle part. On se demande bien comment les gamins pourront secouer les lieux demain.
En attendant que ça se termine, chacun fait bonne figure, on échange des numéros de téléphone au cas où. Il y a sur le visage des choses et des gens, une fine couche de poussière, une tristesse vieillotte. Le monde a déserté les lieux, les fenêtres sont condamnées; chacun se débat dans ses obligations, habitudes, consignes ou directives. Les sourires font à peine diversion.
Rien en effet n’est acquis, dit l’une des enseignantes, il faut toujours être prudent, la tour peut à tout moment s’effondrer. Une autre conclut la soirée: On ira, si on en a le temps, jusqu’à la guerre froide, pas au-delà.