C'est une cohérence toute neuve | Pierre Ménard

C’est une cohérence toute neuve qui s’offre à nous, les shémas intérieurs se mesurent aux enclos des espaces naturels. C’est une façon de percevoir, j’entends par cela une précision d’horloger. C’est confirmer une sensation de déjà vu. Dernières tentations avec picotement de la pupille. L’enquête s’attache aux moindres intonations. Il suffit d’un shéma simple mais une forme controversée. La forme et le contexte ne s’expliquent pas, la seule concession étant l’origine des secrets. Depuis on peut se dire n’importe quoi dans un bruit assourdissant, cela coule de source, malgré les voix inconcevables d’un travail enfantin. Le bruit dans l’espace clôt une discussion dans un profond sommeil. L’image même de nos intérieurs investit l’espace dans la même dérision. À deux c’est le silence comme de toute constellation assumée, ce qui me laisse le champ libre. Sans doute l’attraction principale est la lumière bleue, la surprise brodée, cette autonomie fixée par nous seuls.

Pierre Ménard



écrit par
Pierre Ménard qui m’accueille chez lui dans le cadre du projet de vases communicants : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.

Et d’autres vases communicants ce mois
 Michèle Dujardin et Cécile Portier
 Anthony Poiraudeau et Brigitte Célérier
 François Bon et Marc Pautrel
 Elle c dit et fut il ou versa-t-il
 Christine Jeanney et Juliette Zara
 Zoe Ludicer et Mot(s)aïques
 Dominique Boudou et Anna de Sandre
 Luc Lamy et Frédérique Martin
 Hélène Clemente et Isabelle Rosenbaum
 Arnaud Maïsetti et Daniel Bourrion
 Pierre Chantelois et Hervé Jeanney

Jean Prod’hom

A l’abri


Il arrive parfois que l’homme particulièrement choyé par le malheur songe avec une relative fierté que la Providence l’a choisi parmi tous ceux de son espèce comme le plus apte à supporter les gros pépins qu’elle a placés sur son chemin, alors qu’elle aurait pu tout aussi bien les attacher – avec un égal succès – aux basques d’inconnus. Maigre consolation pour cet élu de la seconde espèce… lorsqu’une tuile, pour faire bon poids, lui tombe sur la tête.
L’homme se retrouve si défait, si humilié qu’il en arrive à s’interroger sur l’identité du démon qui l’a un jour égaré, il se sermonne, met en cause son père et sa mère, ses amis, le passé et l’avenir. L’air s’opacifie, sa tête aussi, il n’en sortira pas.
Soudain un éclair, une idée d’enfant attardé venue de nulle part bouleverse l’horizon, chasse de son cerveau les maux qui l’assaillent, transfigure son visage: « Ce n’est qu’une mauvaise pièce de théâtre et il existe d’autres théâtres! » L’éclair disparaît, l’homme s’est ressaisi.
Courte rédemption! les tuiles de son toit sont patientes. Allongé dans la nuit, les mains croisées sur le ventre, il fait le mort avant de s’abîmer dans le sommeil que la Providence, il le sait, ne visite pas. Petit miracle pour cet élu de la seconde espèce.

Jean Prod’hom