Chauderonnet (Célestin Freinet XLIV)

Riau Graubon / 14 heures

– Vous avez bien mis en lumière les éléments communs aux travail-jeu et au jeu-travail. Mais que faites-vous de la distraction qui est pourtant, n’est-ce pas, une des raisons d’être du jeu?
– Ce n’est pas un oubli du tout, vous allez voir.
Distraire c’est tirer à côté pour disperser l’attention, l’arracher à une occupation ou à une pensée qui l’obsède. […]

Célestin Freinet, Oeuvres pédagogiques I,
L’Education du travail, 1949
La distraction n’est nullement une nécessité

 

Jardin (Célestin Freinet XLIII)

Riau Graubon / 19 heures
Si vous aviez observé les enfants avec moins de parti pris, vous auriez certainement été frappés par la façon totale et exclusive dont ils se donnent à ces activités. C’est comme s’ils n’étaient pas de notre monde. La pluie peut tomber, ou l’école sonner, ou la maman appeler en vain pour manger la soupe qui refroidit… Il faut terminer la partie, avant de l’abandonner, non sans un profond regret que tempère l’espoir d’une reprise si proche. Et de pauvres savants prétendraient trouver mieux! Ils imaginent des jeux méthodiquement classés par catégories, dont ils emplissent des livres destinés aux instituteurs ou aux moniteurs qui enseignent aux enfants à jouer. Et quand ceux-ci ont parfaitement compris les règles du nouveau jeu, et qu’ils sont délivrés de l’autorité qui l’impose, ils se réunissent clandestinement, déclenchent une comptine, et se donnent sans réserve à un de ces jeux-travaux qui restent pour eux l’idéale nourriture.
Célestin Freinet, Oeuvres pédagogiques I,
L’Education du travail, 1949
Jeu-travail et instinct

Un livre

On a retrouvé aux Diablerets, tout près des corps de Francine et de Marcelin Dumoulin relâchés jeudi passé par le glacier de Tsanfleuron, une bouteille de limonade de chez Coudray Frères et Cie à Sion, une montre-oignon, un sac en peau de chèvre que le second avait confectionné pour l’un de ses amis de Savièse et qu’il avait décidé d’étrenner ce samedi 15 août 1942, jour de l’Assomption. Et un livre.
S’agit-il du roman du chanoine Michellod, consacré à la mère de celle qui fut prisonnière des glaces pendant plus d’un demi-siècle, La Brésilienne, dans lequel l’homme d’église ressuscite Eglantine, une étrange créature qui, après un séjour de deux ans au Brésil, vécut à Lourtier en faisant, jusqu’à la fin, note Anne Troillet-Boven dans ses Souvenirs et propos sur Bagnes, figure de corps étranger?Conjecture insensée! La Brésilienne du chanoine Michellod ne parut qu’en 1966; en atteste la page 225:
«Emile, dis-je, il faut que tu me lises cette lettre. Elle doit venir de Savièse et je ne pressens rien de bon.» Emile rapprocha de son visage le falot que je venais d’allumer. Il prit le papier que je lui tendais et lut. «Bien chère, grand-mère, c’est moi Jean-Pierre qui vous écrit… un grand malheur nous est arrivé, car nous pleurons tous à la maison. Nous ne savons pas si papa et maman reviendront… »
La police valaisanne me confirme à l’instant qu’il s’agit d’un missel.