Chalet des Enfants

Lausanne / 16 heures

Ayant allumé une lanterne en plein jour, il dit : « Je cherche, mais quoi? »

Le soir, les va-t-en-guerre descendent les stores, la présidente se brosse les dents, son compagnon boit une tisane, le ministre enfile son pyjama, son bras droit prend un somnifère, les officiers de sécurité se coulent un bain, les criminels se font tout petits. Cette nuit, tous dormiront comme des anges.
Dehors une brise se lève, les arbres du verger sont en fleurs, le pré fait la roue, le renard sa tournée. Bientôt la pluie.

Ne pas oublier l’eau, ne pas oublier l’eau et l’avoine.

Bibliothèque

En Marin (J.-L. Rochaix)

Se laisser glisser sur la pente aménagée par le collectif en coupant au plus court, ou la remonter à contre-sens jusqu’au lieu d’où l’on vient sans ménager ses peines. Deux visages que mes premières années ont fait coexister sans heurts, avant que je prenne conscience de la tension et des orientations opposées que ces deux manières d’être enveloppent, et que j’aurai pour tâche de réconcilier (comme les deux lignées dont on est issu et qu’on aperçoit en vieillissant surgir au fond du miroir et bientôt se confondre): la foi en l’existence que mon père m’a remise en héritage, et les exigences de la raison qui me viennent des hauts d’Epalinges.
Rapprocher les sourires de ceux qui ont tout ou qui se satisfont de ce qui est, avec les grimaces de ceux qui n’ont rien ou qui veulent autre chose, replier les dimanches sur les jours ouvrables, les bienfaits de l’ignorance sur ceux de la connaissance, voilà ce qu’attend ceux qui sont nés dans la pente, l’écriture est, elle aussi, un replat où l’on naît, où l’on naît une seconde fois.

Bois Vuacoz

Corcelles-le-Jorat / 12 heures

Si je fais ce film, je montrerai Lausanne, vu peut-être par une dame, qui serait peut-être une petite fille au Chalet-à-Gobet. Elle descendra. Quand elle sera à la place de l’Ours ce sera un jeune fille. Elle descendra à la rue de Bourg comme une fille formidable et puis après, à la gare, elle commencera à prendre de l’âge et ce sera une vieille dame qui arrivera à Ouchy. 
Freddy Buache, qui rapporte en 1998 ces mots que lui a adressés Jean-Luc Godard en 1981, à propos d’un film qu’il ne fera pas, ajoute:
Je dis ça aujourd’hui publiquement parce que ça peut être un sujet que peut prendre quelqu’un d’autre aujourd’hui.
Si donc je fais ce film, je montrerai Lausanne vu par une dame qui serait une petite fille à Ouchy. Elle montera. Quand elle sera à la gare, ce sera une jeune fille. Elle montera la rue de Bourg comme une fille formidable et puis après, à la place de l’Ours, elle, commencera à prendre de l’âge et ce sera une vieille dame qui arriverait à Ouchy. Ça peut être un sujet que peut prendre quelqu’un d’autre aujourd’hui.