Cathédrale de Cefalù

Cefalù / 15 heures

Il y a, à Bagheria, d’innombrables réservoirs d’eau de pluie et quelques-uns des reliquats de l’aventure industrielle, des résidences et des maisons en ruine, des rues vides, du linge qui sèche aux balcons, quelques ceps de vigne, une décharge à ciel ouvert. Et au-delà la mer.
Il y a, à Altavilla, quantité d’immeubles à vendre, des serres en lambeaux, des landes, des terrasses, des glycines, des sens interdits, des drapeaux tibétains. Et plus loin la mer.
A Trabia il y a des grues, des HLM, Esso, des môles, des petites fleurs rouges dont je ne connais pas le nom, des terrains vagues, des impasses, des feux de signalisation, des palmiers et des roselières. Et encore la mer.
Il y a des rangées de villas à Termini, des volets fermés, des stores baissés et du linge, des panneaux solaires et des haies, des vergers oubliés, des sens uniques, des pigeons ramiers, Iveco, les eaux du San Leonardo, une station électrique. Et la mer, toujours la mer.
J’ai vu quelques hirondelles sur le terminal pétrolier de Fiumetorto, des interdictions de stationner, des genêts et des coquelicots, le Torto, des citronniers et des liserons, des antennes de télévision, des eaux usées qui coulent vers la mer.
Il y a, à Campofelice, des orangers et des oliviers, des friches, des parkings, le torrent de Rocella, des maisons bourgeoises, des cactus, des eaux mortes, des portails, des serrures.
Entre Lascari et Cefalù, l’architecture et l’aménagement du territoire demeurent sommaires, il y a pourtant des pins, des courts de tennis envahis par la mauvaise herbe, des treillis, des taillis, des limitations de vitesse, plus loin quelques souvenirs normands, byzantins, arabes, la ville vendue aux marchands et des gamins qui se baignent.
On a retrouvé la semaine dernière des pierres du Pantocrator, de la Vierge et des apôtres au pied de la mosaïque de l’abside de la cathédrale. Des ouvriers montent aujourd’hui, avec baudriers et mousquetons, des échafaudages jusqu’au ciel, c’est un manque à gagner. Le marguiller m’annonce que, fort heureusement, peu de mariages ont été agendés. Dieu me regarde une dernière fois, avec une intensité que les circonstances pourraient justifier, avant que les rideaux ne tombent sur les soins intensifs et continus que les spécialistes vont lui dispenser pendant la semaine pascale, ce n’était pas prévu.

 

 

Capo

Palerme / 12 heures

Ce qui m’a décidé à entrer en fin d’après-midi dans l’oratoire du Rosaire de Saint-Dominique, ce ne sont pas tant la ribambelle d’angelots et les seize statues vertueuses, en stuc, réalisés par Giacomo Serpotta, que la grande peinture attribuée à Van Dyck, que les auteurs de mon guide annoncent ainsi: Notez un exceptionnel Van Dyck, dans lequel la Vierge se bouche le nez, importunée par les effluves nauséabondes de la peste de 1624.
En réalité seul un angelot se bouche le nez au premier plan, avec à ses pieds un crâne, des roses que sainte Rosalie touchent du bout des doigts, Olive, Agathe, Christine et Nymphe qui entourent saint Dominique recevant des mains de la Vierge le rosaire.
Était-ce manœuvre pour attirer le naïf que je suis et que le mauvais goût ne rebute pas, ou légèreté des rédacteurs tout prêts à assurer, comme on a l’habitude désormais de le faire, qu’il aurait pu en aller ainsi, que Van Dyck n’aurait pas manqué, si on le lui avait demandé, de peindre le dégoût sur le visage de la Vierge avec le talent qu’on lui connaît.

Z.I. La Pussaz

Bressonnaz / 12 heures

Rétrobus est une association qui s’est proposé en 2001 de sauvegarder le matériel roulant historique de Lausanne et de ses environs. Leurs membres se sont donné la tâche de le rénover et d’exploiter quelques-uns des véhicules qui leur ont été – et leur seront – confiés.
En 2006, cette association s’intéresse à une halle de plus de 1300 mètres² à Moudon et cherche les 700 000 francs demandés. Le syndic de l’époque se réjouit de cette initiative: Le projet de ce dépôt-musée est original. Il pourrait vite devenir une curiosité intéressante pour Moudon. En 2007 la moitié de la somme est collectée; en 2008, ces passionnés de trolleybus et d’autobus sont autorisés à occuper cet ancien hangar de l’armée suisse.
C’est en 2010 que l’association accueille la dernière voiture de la Ficelle – qui a circulé jusqu’en 2006 entre Ouchy et le centre-ville. Annoncée en 2008 dans le Vercors, à Saint-Cergue en 2009, puis à Châtillens dans la Broye, cette voiture doit devenir une des attractions touristiques de la la région de MoudonNous la conservons, continue le président de l’association, comme une pièce de musée que le public pourra visiter. Elle sera remise en état et retrouvera ses anciennes couleurs, bleu ciel et gris.
C’est elle que je cherche ce matin, j’aperçois finalement le président et le vice-président de l’association, entre deux épaves; notre entrevue sera de courte durée, ils m’invitent à faire ma demande par écrit. Je rentre un peu désappointé.
Surprise au Riau: une hirondelle se tient immobile sur le fil du téléphone, une seconde virevolte autour du sapin de chez Maurice.