Port de Grandson

port_de_grandson

Grandson | 15 heures

Dans l’arrière-pays, lorsque la bise noire a débarrassé la terre de ses excédents, l’a poncée jusqu’à l’os, briqué les labours, affuté les chaumes, lorsqu’elle a, dans les villages, décapé les crépis et lavé les bords de route, il ne reste plus rien de la peau de la terre, sinon le rose pâle de sa chair mise à nu.
Prenez garde si vous mettez le nez dehors, le rose deviendra d’un coup bleu et cassant, comme de la porcelaine, et vous risquez bien, comme saint Barthélémy, d’y laisser votre peau.

valeyres_sous_montagny

Valeyres-sous-Montagny |  | 16 heures 

La Broye

canard_broye

Moudon | 16 heures (Harle bièvre)

Le poète a croisé des architectes, des artistes, des hommes d’affaires, des mercenaires et des confiseurs. Il a défriché des terres de basse altitude très arrosées sans jamais les exploiter, n’a laissé à personne le temps de s’établir. Est allé de l’avant et de travers comme un chien sans collier. Jamais il n’a reculé, à l’image des peuples des hautes terres alpines, poursuivant un monde qui s’écarte en cascade de lui-même.
Le 25 décembre 1956, Robert Walser quitte à petits pas serrés l’asile d’Hérisau, penché comme on écrit. Il trace dans la neige molle le chemin parcouru, l’ombre d’une échelle au pied et au sommet de laquelle j’entends la voix qui s’est tue.
Pas de congère ce mardi-là, pas de bise non plus.

Les Liaises

liaises_chalet_des_enfants

 

Chalet des Enfants | 14 heures

Les chevreuils et les renards ne vont pas au plus court; leurs traces capricieuses en hiver sur la neige en attestent, tressent d’infigurables guirlandes; ils empruntent les chemins creux par sections et ne s’attardent guère sur nos sentiers, comme s’ils préféraient frôler nos vies ou les couper à angle droit plutôt que de mêler leurs pas aux nôtres. Et musarder.
Des nuages lourds passent en coup de vent, bleu derrière les branches hautes des charmes, des aulnes et des hêtres, des érables et des frênes. C’est la bise, elle froisse les vieilles feuilles des branches basses d’un chêne, qui crépitent comme un tas de feuilles mortes.
Il fait trop froid pour que les oiseaux chantent et sculptent les bois, seules les flaques d’eau donnent une image de l’étendue. Sur la branche d’un vieux pommier, près de la maison, un merle pique la chair blette d’un fruit oublié.