Un naturaliste a fait la découverte d’un étrange mille-pattes. La communauté des savants est partagée. Je le dis tout net, un mille-pattes de 808 ou de 806 pattes passe encore, mais de 807, ça jamais !
Jean Prod’hom
18 février 2009
Un naturaliste a fait la découverte d’un étrange mille-pattes. La communauté des savants est partagée. Je le dis tout net, un mille-pattes de 808 ou de 806 pattes passe encore, mais de 807, ça jamais !
Jean Prod’hom
18 février 2009
L’un tient le frottoir l’autre l’allumette, ensemble ils boutent le feu et aussitôt les injures fusent. De quoi s’agit-il? d’une dispute autour de noisettes sans goût, un feu de paille sur le blog d’un journaliste de la place. A quelles fins? je l’ignore! Pour escamoter comme souvent l’essentiel et interdire une véritable investigation? Vraisemblablement! mais où est donc le modérateur? Les insultes pleuvent, je redoute qu’ils ne se donnent rendez-vous sur la place publique pour un duel dont je devrai immanquablement être le témoin.
C’est sans compter le héros, et je suis ce héros! Je me lance, affûte ma plume que je glisse entre deux répliques. Je déploie, lame fine, mon art de l’esquive pour éviter les coups qui ne cessent de tomber et celui de la diversion pour éloigner les deux sauvages du champ de bataille. Je redouble de finesse, j’y joins la dérision et quelques figures de l’art de la persuasion, bref ce qui se fait de mieux aujourd’hui dans le domaine.
Je joue si fin, si élégamment, si subtilement que ce qui aurait pu figurer dans le meilleur des traités de rhétorique par l’exemple passe totalement inaperçu, les belligérants font comme si je n’existais pas – m’ont-ils seulement lu? – et m’ignorent et de la pire des façons. J’ai beau me consoler en songeant à la leçon qu’ils regretteront un jour, rien n’y fait, je désespère.
Pourtant on ne les entend plus, aurais-je malgré tout réussi mon coup? Comment en être certain? Je veux m’assurer de mon succès, où sont-ils passés? Google m’aide et je les retrouve bataillant de plus belle sur un autre scène ouverte du net. La haine ne les a pas lâchés, les suit et la bile coule à flots. Je souffre, ils se sont débarrassés de moi de la pire des façons, la honte m’étreint. Je rejoins alors, malheureux et défait, le groupe les rétamés du net qu’un ami a fondé sur Facebook. Personne n’est en ligne! Je quitte le clavecin qui m’a permis tout à l’heure de composer la plus belle des musiques, mais qui a fait de moi, une fois encore, l’égal du soldat inconnu.
Jean Prod’hom
A moins d’avoir pris les précautions nécessaires et de nous y être pris sitôt sortis de l’obscurité, bien avant nos premiers pas et nos premiers mots, quand les choses hésitaient encore à devenir des choses et se refusaient aux châsses sacrées des noms, sachons-le, c’est peine perdue!
Il nous est interdit, qui que nous soyons, de comprendre les choses et les événements que la nécessité sème sans compter ou que les hommes placent intentionnellement sur notre chemin, autrement que l’ont saisi et nous l’ont transmis sans broncher ceux de notre sang, ceux de notre village, de notre quartier, de notre giron.
Et pourtant un peu de vérité nous est livrée à la fin du jour, lorsque notre corps devient poreux et que la raison flotte, un peu avant que ses parois ne libèrent les fines particules de l’âme et que la chouette ne s’envole, quand plus rien vraiment ne vaut la peine.
Avant de s’endormir, l’homme peut alors écarter les faux-semblants, consentir à n’être rien parmi le rien – N’aurais-je pas pu être un autre, le premier venu, aveugle et démuni comme lui? – et deviner lorsque plus aucune lumière ne se glisse sous les volets le fin mot de l’histoire: ce qui s’est imposé à ses yeux n’est en définitive qu’un leurre qui l’a habité tout au long du jour et conduit sans faillir jusqu’à l’horizon, un leurre qu’il doit abandonner dans la paume de Charon, pour se défaire de ce qui l’éloignait de la vérité et entrevoir ce qui n’a pas de nom.
Il convient de ne pas renoncer, de ne pas fermer négligemment les yeux, de ne pas abattre l’un ou l’autre des arbres dont nous sommes les rejetons, de ne pas demeurer de ce côté-ci de l’horizon, de ne pas prendre en otage ceux qui viennent ensuite et qui ne nous doivent rien…
Et ce matin, saisir de ce côté-là les imperceptibles signes, quelques senteurs inouïes sans commune mesure avec celles qui baignent le monde pauvre et convenu que le langage peine à dire, balbutier les nouvelles pousses du tilleul nourries par l’antique souche, les jeunes charmilles, les chèvrefeuilles qui marcottent et les frondaisons qui montent légères dans le ciel mêlant leurs doigts vert pâle aux doigts d’or du jour.
Jean Prod’hom