Déplacement de populations



Les discussions
touchaient à l’occupation
de la vallée centrale
immense cuvette dont on ne voyait pas le fond
on voulut combler cette lacune
en déversant les bris de terre cuite
les morceaux de verre pilé
collectés dans l’île
on appela ce chantier
le chantier du siècle
ouvrage sec qui ne repoussa
ni les larmes ni la soif

malgré l’humidité
venue du large
les faibles variations
du meilleur comme du pire
on craignit que l’eau potable
prenne ses distances définitivement
on craignit une fois encore
la disparition de la lagune
on but la contradiction
jusqu’à la lie en subissant
les inconvénients de la sécheresse
les inconvénients des inondations

autrefois
la centrale suffisait largement
on répondait aux pannes
du tac au tac
on n’eut d’autre solution
cette fois
que d’alléger
la dimension des communautés
chefs capturés filles évacuées
lugubre souvenir que celui
des chants d’errance
hommes chargés de sel
réduits à l’aggravation de leur état
arbres renommés
rochers fendus au pied desquels
les sources savantes
avaient perdu jusqu’à l’idée même de pente

au fond de l’oeil des habitants de l’île
s’accumulait la haine des saisons

Jean Prod’hom