Dimanche 22 août 2010
Aujourd’hui comme il y a quelques jours j’ai maintenu un bref instant, en équilibre et dans la fraîcheur, l’humeur gagnée sur le cortège des contrariétés qui me guettaient dès l’aube. J’ai avancé réconcilié sur le chemin qui monte à la Mussilly en longeant celui qui traverse l’extrémité du bois Vuacoz et celle du bois Faucan jusqu’à la Moille-au-Blanc, avec le sentiment qu’aucun événement n’aurait raison de mes nouvelles dispositions dont je savais pourtant par expérience que le temps était compté. Chacun de notre côté mais faits du même bois. L’aboiement de chiens en semi-captivité et de leurs maîtres aux abois, la menace des petites taches sombres de l’avenir qu’on s’invente, les impolitesses de nouveaux riches présomptueux que suivaient deux demoiselles au sourire servile n’ont pas entamé la tranche de belle insouciance, simple et fragile, dans laquelle je m’étais retrouvé. Tout cela ne tenait à rien, mais tenait, se poursuivait même, en partie peut-être par la résolution prise en cours de route de partager ce qui ne m’appartenait pas en tenant à bonne distance ceux qui n’avaient que l’allure des rois. Equanimité d’un seul instant mais qui laissait quelque part dans le paysage l’assurance qu’il pouvait en être ainsi si je gardais à l’esprit – comme on le fait avec une prière – l’assurance que le règne d’un horizon guéri du prurit de l’avenir, sur lequel le dedans et le dehors avancent en équilibre, n’est pas le règne des fins.
Dans tout cela l’écriture n’y est pour rien. Elle n’est qu’une autre ligne d’horizon, sans importance réelle, dans laquelle l’horizon vrai se mire parfois et trouve une image réconfortante de l’avenir, elle est alors comme l’au-delà réduit de l’horizon vrai nettoyé des scories de l’histoire.
Jean Prod’hom