Arena (c)
Juste la vie
à moitié vide
en tous les sens
Jean Prod’hom
Zivilschutzanlage (c)
Des inconnus s’étaient installés à nos portes
on a fini par les oublier
avec eux la pluie et le vent
Jean Prod’hom
La vieille
Elle avait beaucoup maigri
feignait de l’ignorer
oh ! comme elle était belle
Jean Prod’hom
Rua Augusta (c)
C’était une rêverie
relayée par d’autres rêveurs elle m’est revenue
dotée de tous les attributs de l’évidence
Jean Prod’hom
São João (c)
La durée
plus brève que l’instant
plus longue et plus large que l’océan
Jean Prod’hom
Enigme (c.c)
C’est dans un retrait radical
que l’enfant recouvre l’identité
dont il a été dépouillé à la naissance
Jean Prod’hom
Revolução dos Cravos
Le roi Joseph à cheval
sur la place du Commerce
il y a 40 ans le général de Spinola
Jean Prod’hom
Alcochete (c)
De l'autre côté du Tage
des vasières
un cul de sac et des merveilles
Jean Prod’hom
Cemitério Alto de São João
Oasis née du choléra
où fanent les cendres
et les fleurs artificielles
Jean Prod’hom
Azulejos
Déposer le passé et l'immatériel
au Mont-de-piété offrir l'avenir
à celui qui veut bien l'accepter
Jean Prod’hom
Nuit
L’incompréhension de Joseph
la stupeur d’Abel
l’effroi de Winnie
Jean Prod’hom
Belém
On souhaite qu'elle se dérobe
la bonne espérance
mais on a mis le pied dessus
Jean Prod’hom
Mouraria
Pays lointains
les nuages s'y rendent
un canari au balcon
Jean Prod’hom
Ligne du Tonkin
Dans le dernier wagon
du dernier train
un récit coupé de ses racines
Jean Prod’hom
Méthode
Une main lâche la rambarde
s’y accroche
l’autre balance
Jean Prod’hom
Passepartout prépare la nouvelle saison
VÉLO TRIAL Les trialistes du club de Moudon se sont entraînés à Fully.
La bise qui a soufflé dans la Broye n'a pas perturbé les coureurs du club de Moudon, qui s’étaient déplacés cette année en Valais pour leur traditionnel camp de préparation. Plus précisément à Fully, où le Moto-Club a mis à leur disposition son terrain d’entraînement, du lundi 14 au vendredi 18 avril.
Il s’est vérifié une fois encore qu’il pleut moins à Fully qu’à Alger et le soleil a brillé toute la semaine ; pas sûr toutefois que les athlètes aient eu le loisir de goûter à cet air de printemps, arpenter les vignes, se perdre sur le sentier des Follatères ou faire la sieste dans la Châtaigneraie à deux pas de laquelle ils se sont entraînés : le menu préparé par les deux entraîneurs était copieux : équilibre et sauts, endurance, force. René Meyer et Jean-Daniel Savary ont encadré tout au long de la semaine les quinze coureurs, de 9 à 17 ans, qui ont participé; chaque coureur a eu l’occasion de mettre en mots ses motivations et ses ambitions. Le soir une théorie, le rappel des règles concernant les pénalités, des jeux de société. Ah! j’oubliais, un moment de détente aussi, aux bains de Saillon!
Les coureurs et leurs entraineurs remercient le Moto-Club de Fully qui a mis à leur disposition son site naturel, mais aussi le club de trial de Bex où ils ont eu la chance de s’entraîner à deux reprises. Ils remercient également la commune de Moudon et les sponsors pour leur aide financière.
Si les coureurs ont travaillé dur, c’est parce que le début des compétitions approchent ; c’est en effet le dimanche 11 mai que Ropraz accueillera les trialistes de toute la Suisse pour la première manche de la Trial Swiss Cup. Les préparatifs vont bon train, les bénévoles ont répondu présent, c’est bon signe pour l'avenir. Les coureurs du Passepartout comptent une fois encore porter haut les couleurs de Moudon et de sa région. Pensez-y, c’est le dimanche 11 mai, à Ropraz.
Retrouvez les informations sur le site www.trial-moudon.ch
Jean Prod’hom
Texte publié dans « Le Journal de Moudon » et « Le Courrier Lavaux | Oron »
L'autre nuit
Il y a ce silence de quelqu’un qui est sur le point de parler.
Jean Grosjean, « Le silence » in : Si peu, Bayard, Paris 2001
(Difficile de faire un peu de lumière sur la cécité, il conviendrait peut-être de l’entendre à l’intérieur de nos mots et dans le silence qui les sépare, dans le vide qui donne vie à ce qu’ils désignent. On découvre soudain autre chose que ce que l’on croyait. Pénombre et nuit. Hésitation. Alors chacun cherche ses mots, lentement.)
L'aînée se tient debout, à quelques pas de la cadette, assise, qui presse les paumes de ses mains sur ses yeux.
L’AÎNEE -
Il ne faut pas pleurer
ne pleure pas.
L'aînée regarde ailleurs, puis s’éloigne de quelques pas.
L’AÎNEE -
On croit comprendre,
on aurait voulu que les choses se passent autrement.
Mais les choses font ce qu’elles peuvent,
impossible de réparer ce qui a eu lieu.
Alors on pleure.
On peut partager nos vies,
c’est déjà beaucoup.
J’aime la présence de Cisco,
la manière dont il écoute,
dresse l’oreille,
se tient
droit.
Je croyais qu’il habitait les profondeurs.
Voilà qu’il est devenu le miroir dans lequel se reflète le ciel.
Si tu savais ce que sa cécité m'a fait voir !
La cadette, sans regarder l’aînée qui parle, a sorti la tête de ses mains
La CADETTE -
Qu’est-ce qu’il t’a fait voir ?
Et voir quoi ?
quand on ne voit pas ?
Toujours debout, mais plus loin.
L’AÎNEE -
C’est difficile à dire.
Il m’a fait entrevoir,
je crois,
ce que je ne voyais pas,
ou mal.
La nuit surtout,
l’autre nuit,
pas la nuit noire, celle que les enfants craignent.
Non, l’autre nuit,
la nuit claire,
celle qui nous tient éveillés
dans laquelle on a les yeux
grand ouverts.
Il m’a fait voir aussi jusqu’où pouvait aller la confiance,
celle qui l’habite m’émeut aux larmes.
Tu m’entends ?
Il existe une autre nuit,
une nuit qui nous ouvre au jour,
à un autre jour.
Il existe une autre lumière,
une lumière qui éclaire ceux qui ne voient pas.
une lumière qu’ils répandent.
Il y a un mystère,
m’en montrerai-je digne ?
Faire voir ce qu’ils ne voient pas et qu’ils m’ont fait voir.
LA CADETTE -
Je ne comprends pas tout ce que tu dis,
mais j’aime la façon dont tu me parles,
ta voix dans la pénombre,
l’attention que tu me portes.
Ce que tu dis de la nuit aussi,
et du jour.
Je ne vois rien,
j’ai les paumes de mes mains sur les yeux,
mais j’entends.
J’entends
le silence
la confiance.
Alors tout devient soudain plus grand.
A la fin, on est bien obligé d’aller lentement,
n’est-ce pas?
Si on ne brusquait rien,
tout pourrait alors aller de soi.
Et on pourrait se croiser sans crier gare.
Faire les choses les unes après les autres,
lentement.
Lève,
baisse,
tourne.
Croquer une fraise, fermer les paupières, boire au goulot de la fontaine.
Tu m’entends ?
L’AÎNEE -
Le moins de mots possible
pour éviter les confusions,
c’est ça.
Te souviens-tu le soleil qui était revenu ?
Le chemin derrière Bercher, le craquement des arbres.
La joie du papillon qui nous précédait.
Près du Moulin, la Mentue dans laquelle
on avait trempé nos pieds.
Le vrombissement de l’essaim d’abeilles.
L’odeur des fleurs de l’accacia.
Le cabanon où nous devions passer la nuit.
Les rires des petites.
La patience des chevaux.
La confiance qui nous habitait.
Dis-moi !
Est-ce que tout cela se voit ?
LA CADETTE -
Et nos habits détrempés par la rosée,
t’en souviens-tu ?
L’odeur du lait chaud.
Lucie qui n’arrivait pas à faire partir le feu.
Le vent dans les pétales des coquelicots.
Nos laines chauffées par le soleil.
Colin-maillard.
Le temps qu’on voulait retenir.
Les promesses qu’on s’était faites.
La nuit qu’on n’avait pas vu tomber.
Tu m’entends ?
Est-ce que tout cela se voit ?
L’AÎNEE -
Viens !
La cadette se tourne en direction de l’aînée.
Tu m'entends ?
La cadette la rejoint au pas, genou haut. Comme un cheval. Elle tourne à gauche, tourne à droite, tête en-haut, tête en-bas, lentement. Elle continue jusqu’à ce que la nuit tombe.
LA CADETTE -
Dis-moi encore ce qu’on ne voit pas.
Il fait nuit.
L’AÎNEE -
Il y a le jour avant qu’il ne se lève,
la confiance,
il y a la nuit avant qu’elle ne tombe.
Il y a ce silence de quelqu’un qui est sur le point de parler.
LA CADETTE -
Encore.
Silence
Jean Prod’hom
Loi des aires
En équilibre
centrifuge et centripète
le milan royal les saules aussi
Jean Prod’hom
Perdu le nord (c)
Impossible
de retrouver le fil
les hirondelles sont de retour
Jean Prod’hom
Jacques Drillon
La poésie qui se proclamant comme genre littéraire
s’est affranchie des signes de ponctuation
souffre plus du manque de virgules que de l’absence de points
Jean Prod’hom
Appréhension (c)
Tu doutes de la solidité de la terre
crains le feu qui couve
ferme le poulailler et allons boire un thé
Jean Prod’hom
Il y a mieux à faire
Les salariés de l’enseignement obligatoire
colportent on le savait les vérités d’avant-hier
avec l'assurance des scientologues c’est nouveau
Jean Prod’hom
Jeu (c)
A l’intérieur de soi
une partie à deux
l’un est seul l’autre est foule
Jean Prod’hom
Antienne
Coups d’archet sur les mousquetons de la balançoire
trilles liquides dans le tremble
un enfant et un merle aux deux bouts du pré
Jean Prod’hom
Weltanschauungen
Je l'appelle l’Escargotière
tu l'appelles le village des Italiens
autres rêves
Jean Prod’hom
Prévenant
L’enfant du pays a placé des bancs
sur tout le territoire de la commune
et bien au-delà encore
Jean Prod’hom
Clôture (c)
Un suaire tient
le monde et nos visages
à l’abri des hommes
Jean Prod’hom
Bande à part (c)
Dormir en plein jour
parfois
sans demander son reste
Jean Prod’hom
Travaux de printemps (c)
Le ciel a repoussé l'horizon
les bûcherons ont éclairci les bois
reste encore à brûler mes propres dépouilles
Jean Prod’hom
Inconcevable
Inconcevable
la disparition à soi-même
ce qui fait vivre le vivant
Jean Prod’hom
Le petit peuple des oiseaux (c)
Le petit peuple des oiseaux
fixe les limites du jour
pas un mot sur la nuit laissée au cri du seul hibou
Jean Prod’hom
En Rachigny (c)
Poussés de l’arrière
tendus vers l’avant
l’oubli et la mémoire au pas d’amble
Jean Prod’hom
L’adolescent
L’adolescent écartait de la main
tout ce qui aurait pu l’intéresser
pas question de se mettre la bague au doigt
Jean Prod’hom
Le verrier
Le verrier est mort l’autre jour
nulle part
partout
Jean Prod’hom