IV



Nés là un matin de printemps, à côté du café ou derrière le battoir, ils arpentent d’un pas décidé, le dimanche à l’aube, les bois de fayards et de sapins. Les cloches de l’église du village leur rappellent qu’ils sont nés pour rester. Cinquième ou sixième d’une famille de huit ou neuf, ils ont pour seule tâche de laisser le pays comme on le leur a laissé. Ils ramassent alors, sans arrière-pensée, ce que ceux qui ne font que passer ont abandonné le long du chemin. Amateurs de framboises qu’ils tiennent dans leurs mains puissantes, ils passent eux aussi, leurs yeux brillent, ils ont le sourire des anges.

Jean Prod’hom