L'approche de la fin de l'année scolaire

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Cher Pierre,
L'approche de la fin de l'année scolaire me fait perdre de la hauteur, au moment même où il serait nécessaire que j'en prenne davantage. C'est, je crois, une variante d'une loi universelle dont chaque homme sensé aimerait s'affranchir ; mais il lui faudrait pour cela être assez fou pour renoncer aux bénéfices que lui procure l'organisation acharnée de la concurrence.

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En rentrant, je fais une halte sur la terrasse de Praz Collet où je tente de mettre des mots sur ce que j'ai vu - une image ? un paysage ? un souvenir ? - lorsque je me suis arrêté, un jour d'hiver 1999, au Riau.  
J'embarque Arthur à l'arrêt de bus, content de son travail sur la Seconde Guerre mondiale ; je le dépose, il s'installe dans le hamac, lunettes de soleil et costume de bain. Je monte avec Oscar au triage, demeure à respectable distance du sapin des bouvreuils, assis sur une souche. La femelle est dans son nid, je patiente une bonne demi-heure. Je vois enfin une lueur rouge qui s'agite, c'est le mâle qui se penche, deux fois, trois fois ; les petits sont nés. Je rentre raccommodé.
Arthur n'a pas quitté le jardin et travaille ; je lave une salade, prépare une crème au chocolat minute, beurre des tranches de pain sec, pose un morceau de fromage sur des quartiers de tomate, réchauffe des nouilles et casse dans la poêle cinq œufs.
C'est l'époque de l'année où les dernier rayons du soleil se glissent à l'arrière de la maison, je m'assieds sur l'une des marches de l'escalier de l'entrée. Sandra va faire le petit tour avec Oscar, Louise l'accompagne en trottinette jusqu'à la rivière. On entend les sonnailles des bêtes à Jean-Paul, Louise et Arthur jouent. Il y aurait tant à dire des hommes qui se réconcilient tandis que la nuit tombe. Il ne reste au soleil qu'une largeur de main avant de disparaître derrière le bois.

Jean Prod’hom